LES ÂGES DE LA VIE ENTRE DÉRÉGULATION ET RECOMPOSITION
A l’heure où la médecine régénérative promet de vivre jusqu’à 130 ans en 2050, l’allongement des espérances de vie a déjà profondément transformé le panorama des existences. En effet, la « police des âges », qui régulait par l’âge d’État-civil l’accès à l’école, au vote, au mariage, au travail ou encore à la retraite reflue sous l’effet du « brouillage des âges » selon lequel il semble désormais souhaitable de se former et se transformer à tout âge. L’escamotage des seuils d’âge d’État-civil antérieurs, qui établissaient qu’il était soit trop tôt, soit trop tard pour passer d’un âge de la vie à l’autre, déplace et métamorphose l’ensemble de ces passages. Certains sont devenus plus précoces, d’autres plus tardifs. De nouveaux âges de la vie apparaissent, tels l’ « adulte émergeant » ou les « seniors ». Par ailleurs, le télescopage de phénomènes anthropologiques et démographiques mondiaux déplace fortement les enjeux démographiques et intergénérationnels. Ainsi en va-t-il par exemple :
- de la perspective de la « fin de l’âge » prophétisée par Aubrey de Grey [1], du fait des progrès actuels et des excès possibles des biotechnologies ;
- de l’importance prise par l’âge subjectif qui définit et oriente au moins autant les parcours de vie que l’âge chronologique, ainsi que l’annoncèrent les travaux de Bernice Neugarten [2].
- du contraste entre les pyramides des âges occidentales, devenues des obélisques, avec celles des pays pauvres, posant la question de la régulation des flux migratoires entre pays âgés et pays en forte croissance démographique, au principe d’études interculturelles sur l’avancée en âge telles celle d’Hassan Brohmi [3].
Ainsi, la dérégulation des normes d’âge qui provoque la reformulation en cours des âges de la vie rend obsolète une partie de la psychologie développementale du siècle dernier. Elle interroge alors l’identité au fil de l’âge, mais aussi la tension entre le désir de grandir tout au long de sa vie et la crainte de vieillir caractéristique des cultures contemporaines. Faisant suite à différents colloques et publications antérieurs [4], ce colloque international interdisciplinaire a pour vocation de réfléchir aux questions cruciales qui en résultent, afin de confronter l’état actuel des connaissances tout en offrant aux chercheurs, aux praticiens et aux politiques concernés l’occasion de repenser les âges de la vie au 21ème siècle.
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[1] de Grey, A. (2007). Ending Aging. The Rejuvenation Breakthroughs that could Reverse Human Aging in our Lifetime. New-York : St. Martin’s Press.
[2] Neugarten, B. (1996). The Meanings of Age. Chicago : University of Chicago Press.
[3] Brohmi, H. (2008). Pour une approche interculturelle des populations migrantes vieillissantes originaires du Maghreb. Dijon : CASNAV.
[4] Colloque International « Nouveaux processus identitaires et âges de la vie » (UCO Angers, 1998) ; Colloque « Bien-être et âges de la vie » (UdN, Le Croisic, 2010) ; Colloques « Formation et vieillissement » (UHA Mulhouse, 2011 et 2013) ; publications de l’équipe de recherche CAFORE/Département SHS du Pôle Recherche de l’UCO)